Nick Cave and the Bad Seeds a connu dans ces colonnes le plus haut et le plus bas, aussi Est-ce avec toujours beaucoup de circonspection que j’ai écouté leur « Tender prey », réputé
sans doute comme leur meilleur album.
A l’époque les guitaristes Mick Harvey (également bassiste), Blixa Bargeld, Roland Gold, Kid Congo Powers et le batteur Thomas Wylder épaulent le chanteur maudit.
Sorti en 1988, « Tender prey » et sa pochette aussi sobre qu’inintéressante représentant le chanteur débute par « The Mercy seat » long titre ténébreux et intense assez
emblématique de la musique torturée du corbeau et de ses acolytes.
Moins d’intensité sur « Up jumped the devil » mais une comptine effrayante ou la classe la plus pure dispute à la noirceur la plus profonde.
Influencé par un chant religieux assez lourd, « Deanna » est en comparaison presque joyeux surtout lorsque vient juste derrière la ballade dépressive « Watching Alice » et son
duo piano-harmonica triste comme la pluie.
Dans le même registre, le lancinant, étrange et sinistre « Mercy » n’incite pas vraiment à la l’explosion de joie mais plutôt à la lente introspection nihiliste sur l’absurdité de
l’existence.
Nick Cave empoigne encore son harmonica pour nous réveiller avec un rock puissant « City of refuge » aux refrains scandés pendant près de cinq minutes jusqu’à la transe.
Sans doute pour adoucir un peu l’ambiance, l’australien se mue en crooner sur « Slowly goes the night » plus sensuel et moins dramatique.
La suite lasse un peu avec le lent et terne « Sunday’s slave » puis le répétitif « Sugar, sugar, sugar » qui patine tout seul.
On prend un peu de hauteur avec « New morning » à l’harmonica toujours aussi mélancolique avant une nouvelle édition non indispensable de « The Mercy seat »
En conclusion, malgré des débuts plus que prometteurs « Tender prey » ne tient pas la distance et finit par s’essouffler passé sa première partie.
Quelques titres puissants, la verve de composition de Nick Cave avec des atmosphères très sombres, torturées et dépouillées à l’extrême ou l’homme se retrouve face à solitude et à ses propres
démons intérieurs mais aussi quelques facilités, un style par instant stéréotypé s’enlisant dans son propre spleen agonisant.
A son écoute, on se dit que « Tender prey » aurait pu être un disque immense avec un peu plus de groove, de guitare, un peu plus d’énergie vitale insufflée par instant pour briser cette
monotonie piano-voix, qui s’installe inéluctablement au fil de son déroulement.
Dommage donc et Nick Cave de encore une fois me décevoir.